Identité, Patrimoine : Naissance d’une ville
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Appartenant à la troisième section de Gennevilliers, le hameau de Villeneuve-la-Garenne réclame sa séparation de Gennevilliers pour fonder sa propre commune. Un rapport soumis par le Cercle indépendant, association défendant les intérêts du hameau de Villeneuve et de ses habitants, rencontre de nombreux obstacles : réticences du Conseil Municipal et de la préfecture, inondations de 1910, Première Guerre mondiale de 1914 à 1918.
Le 9 avril 1929, la commune de Villeneuve-la-Garenne est née et désigne le 17 mai 1929 son premier Maire, Homère Robert.
Pendant la Révolution de 1789, les hameaux de Villeneuve-la-Garenne et des Grésillons sont rattachés à Gennevilliers.
En 1886 un citoyen de Villeneuve, Weber, apporte une pétition demandant que désormais, les élections locales se fassent par section, en proportion du nombre des électeurs, au village, aux Grésillons et à Villeneuve.
Les habitants de Villeneuve pensent obtenir ainsi un meilleur partage des responsabilités au sein du Conseil Municipal. Mais celui-ci rejette leur demande. C’est le Conseil Général de la Seine qui, alerté, décide de donner satisfaction aux pétitionnaires.
En vertu de la loi du 5 avril 1884, si plus du tiers des électeurs d’une section demande (par pétition adressée au Préfet) l’autonomie, sa demande doit être prise en considération et sa requête étudiée par trois commissaires-enquêteurs et une commission syndicale.
Entre Villeneuve et Gennevilliers : une séparation légitime
Dans un rapport, les raisons invoquées pour la séparation portent sur :
- la différence de goût et d’origine entre les deux noyaux d’habitants ;
- la mauvaise répartition des dépenses (pour l’entretien des routes, l’éclairage au gaz et l’installation de bornes-fontaines) entre les trois sections de Gennevilliers, au détriment de Villeneuve ;
- la viabilité de la nouvelle commune, sans augmentation sensible de ses charges contributives ;
- la trop grande distance entre le hameau et les édifices communaux et le cimetière, aucun moyen de transport ne comblant cette lacune.
Aucune suite n’est donnée à ce rapport. En 1896, le processus reprend. Nouveaux refus du commissaire-enquêteur, du Conseil Municipal de Gennevilliers (11 juin 1897) et du Conseil Général (rapport du 7 décembre 1897).
Selon le commissaire-enquêteur, les divergences de vues et de mœurs entre les habitants sont réelles mais tendent à disparaître. De plus, la séparation entraînerait la construction d’une nouvelle mairie et d’un nouveau cimetière. Mieux vaut le statu quo.
Suite aux élections municipales de 1908, les élus de Gennevilliers-centre protestent contre l’alliance entre les Grésillons et Villeneuve. Ils donnent leur démission au Préfet, qui la refuse. Ils demandent alors le rapprochement entre Gennevilliers-centre et les Grésillons. Tollé à Villeneuve ! Une pétition circule et recueille 336 signatures. Le processus administratif est relancé.
Une artiste lyrique résidant à Villeneuve-la-Garenne, mademoiselle Dupont du Chambon, lègue 100 000 francs et un immeuble pouvant servir de mairie à la commune. Conformément aux vœux testamentaires de Mme Dupond du Chambon, son ancien domicile sur le quai d’Asnières est dédié à la culture et abrite aujourd’hui le Centre culturel Max Juclier. L’autre propriété du boulevard de Verdun devient une mairie. Quelques décennies plus tard, étant devenue trop petite pour la population qui s’agrandissait, la première mairie fut détruite pour en reconstruire une nouvelle au même emplacement, celle que nous connaissons aujourd’hui.
Un décret du 20 janvier 1913 signé par le Président de la République (Armand Fallières) autorise le Maire de Gennevilliers à accepter le legs au nom de la section de Villeneuve. L’acceptation du legs (qui représente une somme considérable pour l’époque) implique l’engagement d’œuvrer à l’édification du hameau en commune.
Enfin, pendant les inondations de 1910, la solidarité obligatoire entre les habitants de la presqu’île fait baisser la tension entre les sections de la commune.
Le 13 février 1911, le Conseil Municipal de Gennevilliers se prononce favorablement pour la séparation, par 19 voix contre 2 abstentions.
Une nouvelle commission syndicale est nommée en 1911.
En 1913, son rapport insiste sur l’injuste répartition des équipements et propose un partage équitable des terrains de l’usine à gaz de Gennevilliers, source d’importants impôts locaux.
Le Conseil Municipal de Gennevilliers renouvelle son accord le 9 mai 1914.
La guerre de 1914-1918 suspend toutes les démarches.
En savoir plus sur la Première guerre mondiale à Villeneuve-la-Garenne.
La même commission syndicale rend un nouveau rapport le 12 décembre 1922. Les mêmes motifs pour la séparation sont mis en avant.
Mais le Conseil Municipal de Gennevilliers se ravise et se prononce contre la séparation en 1923. L’accord du Conseil Général de la Seine est néanmoins obtenu en 1926. Prenant acte de cette décision, le Conseil Municipal de Gennevilliers supprime le sectionnement électoral, ce qui aboutit au regroupement de Gennevilliers-centre et des Grésillons et induit implicitement la séparation avec Villeneuve-la-Garenne.
La création en commune distincte de Villeneuve-la-Garenne, dotée d’une mairie et d’un groupe scolaire (écoles de garçons, de filles et maternelle) mais non d’un cimetière, est autorisée par la loi du 9 avril 1929 (promulguée au Journal Officiel du 14 avril 1929).
Un décret accompagne cette décision, signé du Président de la République, Gaston Doumergue.
Homère Robert est nommé Président de la Délégation spéciale le 2 mai 1929, avant d’être élu Maire le 17 mai 1929 par le Conseil Municipal, suite aux élections municipales du 5 mai 1929.
De ce début de siècle subsiste encore une ancienne villa, qui accueille aujourd’hui l’école de musique. L’association l’Union Musicale, qui fonctionnait depuis 1958, avait fondé à l’origine une première école de musique en 1969. Municipalisée au début des années 2000, l’école de musique Claude Debussy est aujourd’hui propriété municipale. Elle compte plus de 300 élèves qui ont le choix parmi une vingtaine d’instruments.
Le 20 août 1844, la construction du premier pont reliant Villeneuve-la-Garenne à l’Île Saint-Denis, elle-même ainsi reliée à Saint-Denis, aux portes de Paris, marque l’arrivée d’une nouvelle population dans la commune. Les Parisiens découvrent alors Villeneuve la Garenne, une jolie campagne où la Seine joue un rôle central et va susciter un intérêt particulier. Des pêcheurs s’invitent sur les quais, et les passants viennent profiter de cet environnement paisible pour se promener et emprunter des barques pour des balades sur l’eau.
Villeneuve-la-Garenne devient l’endroit à la mode où l’on passe délicieusement ses fins de semaine. Plusieurs guinguettes sont installées, et les promeneurs peuvent manger ou danser à leur guise. Cet engouement pour les bords de Seine va émouvoir les peintres du mouvement impressionniste, qui vont installer leur chevalet le long des quais.
C’est notamment Edouard Manet, originaire de la ville voisine de Gennevilliers et précurseur de ce mouvement sans pour autant y appartenir, qui va faire découvrir à ses amis impressionnistes cette campagne bordée de Seine. Sa belle-sœur, Berthe Morizot, artiste elle aussi, y viendra régulièrement également.
Parmi les amis de Manet, Alfred Sisley, artiste peintre et graveur, va notamment peindre 5 toiles à Villeneuve-la-Garenne, entre le printemps et l’été 1872. Citons par exemple le tableau « Villeneuve-la-Garenne » ou « Village au bord de la Seine », exposé au musée de l’Ermitage à Saint-Pétersbourg, ou bien encore le célèbre tableau « Le pont de Villeneuve-la-Garenne », aujourd’hui exposé au MOMA à New-York. Dans ce tableau, Sisley représente l’entrée de la ville et son avenue de Gennevilliers depuis l’Île Saint- Denis, avec le pont qui liait les 2 bourgs. Au premier plan, on peut également voir plusieurs barques et bateaux, symbole de l’activité batelière de la commune. A l’époque, on trouve des maisons bourgeoises et des hôtels particuliers tout le long des quais, avec des façades très variées. Au numéro 39 se trouvait par ailleurs la société des automobiles ARIES, fondée par le baron Charles Petiet, installée dès la fin du 19e. Aujourd’hui, le pont n’est plus le même, remplacé au début du XXème siècle, et quelques maisons ont été progressivement remplacées par des immeubles.
A travers ses différents tableaux, Sisley a su évoquer le silence et la tranquillité de cette région encore alors non défigurée par l’industrie et la civilisation. Le célèbre peintre Renoir disait des toiles de Sisley qu’elles donnaient envie de s’y promener.
Afin de lui rendre hommage, ces quais, autrefois appelés quais d’Argenteuil, ont ainsi été renommés du nom du peintre, qui aura su les immortaliser. Véritable invitation à la balade et à la contemplation de la faune et de la flore, voire à la peinture, les quais Sisley font indéniablement partis du patrimoine de Villeneuve-la-Garenne.